mardi 19 février 2008

Chapitre 29

29

15/10/3023 Datation légale de Valence.

19H00 / 24 : horaire du vaisseau potentiellement innocente

Compte rendu du potentiellement innocente par Mérino :

Vous êtes vous déjà posé sur de la roche en fusion ? Personnellement, je pensais que ce n’était pas envisageable. Pourtant, Echo l’a fait. Et pour de vrai. Et vraiment posé, bien stable et tout mais sur rien. Enfin rien de tangible. Nous nous sommes posés sur une planète artificielle. Un chantier colossal. Une expérience de Valence pour transformer un vieux roc stérile en paradis naturel en reconstituant artificiellement les conditions de la vie. J’ai un peu de mal à imaginer comment de la vie pourrait apparaître entre deux explosions volcaniques.

Si je pouvais trouver une maigre consolation à la situation, c’est que j’ai eu l’impression de me rapprocher du patron mais ce n’était qu’une illusion. En tout cas, il n’a pas trouvé opportun de nous expliquer la raison de notre présence ici.

Moi, je disais que j’étais prêt à tout pour retrouver le petit mais faut être logique, tous ensemble on serait plus fort. Déjà que j'étais plus sûr de pouvoir faire confiance en Thymothe et Echo. On n'avait plus reparlé de leurs craintes concernant Martel. Je n'osais pas aborder le sujet préférant rester sur des sujets de discussions non soumis à polémique. Le potentiellement innocente avait repris une occupation commerciale normale quoique réduite et au sujet de Maelie, Nanti se contentait de soulager mon anxiété par des rapports laconiques du style : tout va bien, ça stagne ou ça se déroule comme prévu. Sans me parler de ce qui était prévu bien entendu. A l'extérieur des champs de forces du vaisseau tout n'était que roches en fusion, je peux pas vraiment dire que je sois tout à fait à l’aise par ici mais si vraiment ça avait une utilité d’être là, je serais pas contre. Faudrait juste qu’on m’explique.

« On attend quelqu’un ».

Une nouvelle explosion secoua le potentiellement innocente. « On ne pourrait pas l’attendre un peu plus loin de ce truc ». Je désignai la planète artificielle. Dans quelques millions d’années, peut-être que ce serait un home sweet home mais en attendant, je n’y passerais pas mes vacances. En imaginant que j’ai des vacances un jour.

Quand on regarde le sol, on ne voit que la lave qui nous entoure et recouvre le noyau artificiel, cœur de la planète et source de toutes les réactions chimiques devant transformer ce truc en quelque chose. Hé, il y a du monde qui arrive !

Thymothe se précipita à mes cotés. Une dizaine de personne. Genre militaire, balai dans le cul de fonction et devant un homme dissimulé sous un grand manteau noir pourtant ça m'étonnerait qu'il manque de chauffage sur ce truc.

« Jumelles ». Je tendis la main en position d’attente.

« Tu peux aller te les chercher, elles sont avec les outils de maintenances. »

Elle est belle l’équipe.

Le temps de les retrouver au milieu du fouillis que je suis sensé garder toujours en ordre, Nanti avait retrouvé le groupe à l’extérieur. Il est fou de sortir dans ce truc.

« Il y a des champs de force costaux

- Je me doute mais tout de même.

- Comment s’est passée la rencontre ?

- Le premier mec s’est approché de Nanti. J’ai cru qu’il allait le frapper. Puis ils se sont mis à parler avec animation. Du moins ça en avait l’air ». J’enfilai mes jumelles. « Ha oui quand même, c’est le gérant du four ». Thymothe m’arracha les jumelles. C’est beau la confiance comme si je n’étais pas capable de reconnaître des insignes. Il n’a même pas pu les voir, ils étaient passés hors de son champ de vision.

Il siffla tout de même entre ses dents. « Gérant d’une planète entière, pas mal.

- Oui enfin, la gueule de la planète.

- La garde fait marche arrière » remarquai-je.

- Je vois ça. Je l'ai suivi quelques temps avec mes jumelles espérant voir des structures vivables, sans succès.

- Et les autres sont passés où ?

- Ici » dit une voix derrière nous qui nous fit sursauter tous les deux.

« Bel équipage.

Celui qui avait dit ça était le type au manteau noir, le gérant. De près il n’était pas si impressionnant. Il avait un petit sourire narquois. Mais, c’était le genre de mec qu’on n’avait pas trop envie d’asticoter.

Nanti lui proposa mon siège en m’envoyant valser à l’autre bout de la pièce tout en ordonnant à Thymothe de brancher le projecteur.

Une photo de Martel apparut sur le mur.

Notre invité secoua la tête : « non ça ne me dit rien. »

Il y eut un long silence. Nanti lui faisait le coup de : je ne dis rien et je te fixe jusqu’à ce que tu craches le morceau. Ca marchait à tous les coups avec moi. L’autre était plus fort, il a bien tenu une bonne minute avant de craquer.

« Je ferais mieux de te dénoncer !

- Pour quel motif ?

- Déjà pour la sorcière que tu as placé comme espionne sur l'Impérium.

- Tu es mouillé jusqu'au cou dans cette histoire. »

Voila qui était intéressant, c’est qu’on en apprenait tous les jours

« Mérino, Thymothe, dehors.

- Bien patron. » Je sortis en traînant la jambe le plus doucement possible dans l’espoir de trouver une excuse pour rester avant de franchir la porte, sans succès. Ensuite, je me précipitai au poste de commande rejoindre Echo et demandai au vaisseau de brancher le haut parleur de la salle principale. Ce mec avait une voix que je ne replaçais pas mais j’étais sur d’avoir déjà eu affaire à lui. « Réseau inaccessible » répondit le vaisseau. « Déjà essayé » confirma Echo. Evidemment, pas con le Echo, il espionnait déjà mais il avait été coupé à partir d’en bas.

Merde, Nanti aussi n’était pas idiot. Je me rabattis sur le plan B : me coller derrière la porte de la salle principale pour glaner quelques éclats de voix. Je sais, ce n’est pas joli joli, mais si nous étions un peu plus mis au courant, nous ne serions pas obligés d’agir ainsi. A ma décharge, Thymothe était déjà installé l’oreille collée à la cloison.

« Alors ? » Lui demandai-je à voix basse.

« Parait qu’il y aurait un complot au sein du clan de Valence.

- Il y avait potin là ! C'est-à-dire, qu’est ce qu’il a dit ?

- Le mec que Nanti a invité, le gérant, il a dit qu’il refusait de donner la moindre information à Nanti car il était sûr qu’il préparait un mauvais coup contre Valence. De là, Nanti a dit qu’il en avait rien à foutre de Valence, qu’il voulait juste récupérer son gars. Après, ils ont parlé plus bas, je n’ai rien compris puis le gérant a repris plus fort en disant : « Qu’est ce que tu veux dire par un complot au sein de Valence ? »

Et Nanti a dit qu’il avait étudié le problème en tout sens et qu’il avait déduit que premièrement Martel avait été enlevé par un proche de l’empereur Pantin et que deuxièmement, le prince Matiz et Mélanie n’étaient pas au courant.

- Et alors ? » Demandai-je à Thymothe. Il haussa les épaules. « Je n’en sais pas plus, tu es arrivé à ce moment là.

Je me dépêchais de coller mon oreille aux coté de Thymothe. Nous avions peut-être loupé des informations capitales pendant que Thymothe me résumait la situation.

« Je n’y crois pas » disait le gérant.

Plus rien. Ils recommencent à parler trop bas me souffla Thymothe. Personnellement, je pensais plutôt que Nanti avait refais le coup du silence.

En effet, au bout de quelques minutes, la voix du gérant s’élevait à nouveau.

« Bon, imaginons. Qui ?

- Quelqu’un qui sait se téléporter » dit Nanti très vite.

- Parce qu’on t’a piqué ton gosse par téléportation ! »

Silence à nouveau.

« Merde, Siarro arrête avec tes mystères. Tu ne peux pas me demander de filer jusqu’à l’Impérium couvrir ta petite, te ramener chez moi, me passer limite un interrogatoire et espérer que je te dise quoi que se soit en distillant tes infos. »

J’étais bien d’accord là. Mais au moins ça faisait plaisir de voir qu’il ne gardait pas cette sale habitude que pour ses employés.

Bien sur, je me rappelais quand je l’avais entendu, c’était lui le sorcier qui avait insisté pour qu’ils gardent Maelie. Enfin insister, il avait dit qu’on pouvait la tuer. Sympa le mec.

« Si il y a dissension au sein même du clan, je pense que tu peux déjà me remercier de te prévenir et c’est tout à ton avantage de m’aider. »

Le gérant soupira. « Si quelqu’un a téléporté ton gars, il y a toutes les chances qu’il n’y ait pas résisté et qu’il soit mort avant d’arriver à destination.

- Disons qu’il ait survécu » dit Nanti.

« C’est un sorcier ?

Nouveau silence.

« Si c’est un sorcier, il a plus de chance d’y survivre » précisa le gérant.

« Mais si ce n’en est pas un ou du moins qu’il n’a pas d’implant, peut-il survivre quand même ? » demanda Nanti. Décidemment il ne cracherait pas une miette d’information. Il était fort notre Nanti.

« Non. Enfin, tout dépends des puissances de base de celui qui l’aurait enlevé et de sa puissance à lui.

- Justement, qui en est capable ?

Pour une fois, c’est Nanti qui craqua le premier au jeu du silence : « Pantin, Matiz, Malhari, Mélanie » Il stoppa sur sa lancée espérant sans doute que son interlocuteur poursuive éventuellement sa liste. Trop à espérer.

« Si tu pars dans l’optique du complot, j’imagine mal Pantin faire un complot contre lui-même. En plus, il n’en a sans doute plus la force. Malhari a tout le pouvoir dont on peut rêver, Matiz lui est entièrement fidèle. Mélanie… »

Il y eut une hésitation mais Nanti ne le laissa pas continuer dans ce chemin. « Je ne pense pas que Mélanie soit impliquée ni Matiz. Je ne vois pas de mobile pour Malhari. Cela dit je n’en exclue aucun. Ce que j’ai besoin de savoir c’est si il y a d’autres téléporteurs.

- Non.

Nouveau silence

« Il a dit non » me dit Thymothe. J’avais entendu. Il était con ce Thymothe. « La ferme, j’entends plus rien. »

Il se décida à se taire.

«Saline ?» demanda Nanti.

- Non.

- Si Saline avait un implant elle serait a même de contrer tes pouvoirs ainsi que ceux des autres et j'ai cru comprendre que des implants avaient justement été volés.

- Absurde, Saline est bien trop jeune en plus c'est une petite précieuse qui ne s'intéresse qu'à ses robes et sa coiffure.

- Une petite précieuse qui peut-être n'apprécie pas d'être reléguée au troisième rang derrière ses frères. »

Pour une fois ce n’était pas Nanti qui faisait le coup du silence. Son interlocuteur copiait sa méthode spéciale bouche close.

« Allons, c’est évident ». Insista le patron

« C'est vrai, elle est frustrée comme toute adolescente mais Saline n’est qu’une petite fille et même adulte, je ne crois pas qu’elle soit destinée à quitter cette réalité.

- A-t-elle un implant ?

- Elle est trop jeune. Je te l'ai déjà dit

- D'accord, tu ne peux pas en être sur même avec ta position.

- Et en ce qui concerne la tienne de position, je pourrais te faire enfermer juste pour avoir osé penser une telle chose. »

Ca commençait à chauffer. Thymothe et moi nous lançâmes un regard complice. Ca devenait palpitant. Je comprenais où Nanti voulait en venir. Maelie avait eu un implant à 10 ans et elle avait survécu. Bien sur, les sylphides étaient des malades et Valence n’en ferait pas autant, surtout sur une de leurs enfants. Mais si elle avait agi de son propre chef, c’était possible et Nanti se refusait à écarter la moindre possibilité

« Mon seul but est de retrouver Martel » dit Nanti calmement.

« Je risque ma vie sur ce coup là. C’est malsain. Tu joues un jeu dangereux. Te rends tu compte que ton équipage en est réduit à se coller l’oreille contre les cloisons pour savoir ce que tu mijotes ?

- Jamais mon équipage… »

Merde, on était repéré. Je poussais Thymothe vers l’arrière et entamais une retraite stratégique.

« MERINO, THYMOTHE ! »

Thymothe s’avança vers la porte mais je le retins. « On attend quelques secondes » lui dis-je à voix basse. « Juste le temps de faire croire qu’on vient d’un peu plus loin. »

C’était une bonne idée mais le plan n’eut pas le temps d’être mis en oeuvre, la porte de la salle principale disparut.

J’imitai le mec essoufflé. « Je suis là Patron, vous désirez ?

- Prends moi pour un con. Tu es consigné.

- Mais Patron, je viens juste d’arriver.

- Ils sont là depuis le début de notre conversation. Tu te fais vieux Siarro pour ne pas les avoir remarqués.

- Consignés » cria Nanti.

« Mauvaise idée » dit le régent tranquillement installé dans mon fauteuil, « tu as besoin de tout le monde.

- Tu ne dirais pas ça si tu savais quelle bande d’abrutis je me traîne.

- Une bande d’ignorant peut-être mais vu ta propension au secret, tu ne peux en vouloir qu’à toi.

- Ok » dit Nanti toujours sur un ton trop haut. « Ok, tu as gagné, » Il m’attrapa par le col de la chemise et me propulsa en avant vers le régent qui souriait toujours. « Mérino, va faire joujou avec monsieur le régent qui accessoirement est un des meilleurs sorciers télépathes de Valence puisque ça te fais tant plaisir. »

Je fis un bond en arrière. C’était un coup à me foutre une crise cardiaque ça. L’autre souriait toujours confortablement installé dans le fauteuil et dire que pendant une demi seconde j’avais cru qu’il prenait notre défense. Le monstre parut se désintéresser de moi aussi je reculai vers la porte mais Nanti me la ferma au nez avant que je puisse sortir. « Tu voulais venir, maintenant, tu assumes. »

C’était injuste, c’était Thymothe qui avait commencé à espionner et lui, il avait réussi à filer.

« Tu veux qu’on joue franc jeu » dit Nanti « OK ».

Il s’assit sur une chaise face au régent et je m’en éloignais le plus possible en me collant à l’autre bout de la pièce.

Il lui raconta tout de la façon dont on avait récupéré Martel, les déductions qui l’avait mené à trouver son identité, la façon dont il avait disparu, la visite de Mélanie. « C’est tout ? » demanda le régent.

Je vis Nanti hésiter pour la première fois de sa vie. Il ouvrit la bouche plusieurs fois, la referma tandis que le régent attendait patiemment le sourire toujours aux lèvres.

« Oui c’est tout » dis-je.

« Toi, pour ce que tu sais de toute façon. » Pas sympa le mec mais au moins ma petite intervention avait permis à Nanti de reprendre ses esprits. « Oui, c’est tout » dit-il.

« Bien sur ». Le gérant récupéra son insupportable sourire. « Je me souviens de ce petit Martel. Un petit gosse insignifiant qui trottait dans les jupes de Mélanie dans l'ancien palais d'été de Valence. Il appartient à Valence. A ta place Nanti, plutôt que de courir après, je m’efforcerais de ne pas croiser son chemin. Après, si Mélanie était en contact avec lui, ton coupable est tout trouvé et je m'en vais de ce pas la dénoncer.

- Ne fais pas tes grands airs avec moi. Je sais bien que tu te la joues fidèle de Valence juste pour te faire la belle vie.

- Et accessoirement rester en vie tout court » précisa-t-il.

- Je ne pense pas que Mélanie fasse du mal à Martel et sinon, pourquoi attendre si longtemps ? » reprit Nanti.

« Donc j'en déduis que tu connais les rapports entre Martel et Mélanie. »

Nouveau silence

- Je prends ça pour un oui » dit le régent.

Qu'est ce qu'il veut dire ? » Soufflai-je discrètement à Nanti

Nanti me fit les gros yeux. Qu'est ce que j'avais encore fait moi ? J'étais juste ignorant et même le sorcier avait admis que c'était la faute de Nanti. Le sorcier s'installa plus confortablement dans son fauteuil. « Je t'ai connu plus finaud Siaro, Nanti ou ce que tu voudras. Ton patron a une communication sur son implant, il veut que tu t'en occupes discrètement. »

Je regardais alternativement les deux hommes. Aucun des deux ne m'expliquerait clairement ce qu'il se passe.

« Gère ça avec la vaisseau ». Nanti m'avait engueulé en disant ça. Parce que j'étais sensé tout savoir sans doute. C'était pas moi le télépathe. « Gérer quoi ? »

Je n'aurais pas dû insister, il m'a fichu dehors tandis que l'autre se marrait. J'avais dû passer à coté d'un truc moi.

Je suis allé à la salle des commandes. Il y avait Echo qui montait la garde en grignotant des merdes protéinées. Je lui demandais s'il savait ce qu'il se passait. Il haussa un sourcil. « A quel sujet ?

- Laisse tomber.

- Vaisseau, il se passe un truc ?

- Mode enregistrement. »

Niveau communication, avec le potentiellement innocente, c'est pas encore ça. « Non, c'était une question, je me demandais si tu savais ce qui se passait avec Nanti, parait qu'il a eu une communication ».

Pas de réponse.

Je me repris. « Quand je disais : je me demandais, je voulais dire que je te le demandais. »

Pas plus de réponse. Evidemment, c'était super mal exprimé pour une machine. Echo vint à mon secours.

« Vaisseau, dirige sur le central les communications de l'implant de Nanti. »

Il y eut ce petit hologramme que le potentiellement innocente nous sort quand il accède à une requête mais c'est la voix de Maelie qui nous parvint et très pressée.

« Ca va pas non de couper la communication ainsi.

- C'est Mérino. Tu vas bien ma puce ?

- Où est le patron ? Il m'a envoyé bouler.

- Le patron fait ami ami avec un sorcier télépathe.

Ha oui d'accord Magistère » dit-elle comme si elle allait vomir ce nom. Ca grésillait à mort ce truc, « vaisseau, isole les interférences.

- Opération impossible. »

Que ferait-on sans cette merveille de technologie ?

« Tu n'as qu'à tendre l'oreille Mérino » dit Maelie entre deux grésillements « C'est déjà inespéré que ce joujou puisse fonctionner dans le palais.

- Parce que tu es dans le palais ! » On ne pouvait pas la laisser seule sans qu'elle fasse des conneries elle. Espionnage d'accord mais là elle ne tiendrait pas dix minutes. « Sors de là.

- Ca va pas non, j'ai eu un mal fou à entrer. J'ai profité d'une manifestation. La fête du printemps ils appellent ça. C'était l'occasion ou jamais. Nos soupçons se confirment, Apparemment la princesse Saline aurait disparu depuis deux jours. Ca ne semble pas être source d’inquiétude au palais. Il semblerait que ça lui arrive souvent de se lancer dans de petites escapades sans prévenir personne mais sa présence est requise pour la fête ce qui fait que son absence ne passe pas inaperçue. »

Je repensais aux soupçons de Nanti vis-à-vis de la jeune princesse. « Mais elle est partie, genre quelque part dans l’Impérium ou avec un vaisseau ou… D’une autre façon ? »

« Avec une navette » dit-elle « mais son plan de vol est indisponible.

- Elle ne peut pas aller bien loin avec ça.

- Sans doute. Je vais tenter de glaner quelques informations supplémentaires en me glissant dans les cuisines. Les serviteurs passent leur temps à parler entre eux et si la princesse a été ne fut-ce qu’aperçue sur un des autres vaisseaux de la flotte ça fera le potin de tout le palais.

- Fais gaffe à toi

- T’inquiète. Entrer dans le palais ne fut pas une mince affaire mais une fois à l’intérieur, L’espionnage est facile.

- Fais attention tout de même

- Personne n’est capable de me repérer. Je suis de loin la meilleure.

- Tu crois ça ? »

Oups. C'était pas la voix de Maelie ça « Maelie, que se passe-t-il ?

- Elle n'a pas crié là ? » Echo fut incapable de me le dire. Au milieu des interférences, je ne comprends rien

« Maelie !

- Faut peut-être mieux pas que tu arrêtes de communiquer, si elle fabrique un sortilège tu risques de la distraire.

- Je lui avais dit que c'était dangereux. Pourquoi personne ne m’écoute jamais ?

- Là elle a crié. » Echo acquiesça. J'aurais préféré qui me dise que non.

Les grésillements s'arrêtèrent. « Vaisseau qu'est-ce qui se passe ?

- Préciser le sujet de la demande ».

Heureusement qu'un ordinateur n'a pas forme humaine sinon je lui aurais tordu le cou. « Au sujet de la communication, on n'entend plus rien. »

Comme pour me contredire, le grésillement reprit.

- Maelie ! »

Aucune réponse.

- Maelie ! »

Echo me mit le bras sur l'épaule. « Hé Mérino. Il faut couper le contact sinon ils risquent de remonter jusqu'au potentiellement innocente.

« Qui ça ils ? »

Echo se mordit la lèvre.

Il eut la décence de ne pas enfoncer le couteau dans la plaie en disant « ceux qui ont chopé Maelie ».

Hé merde. Derrière le champ de force j'aperçus le régent qui s'éloignait sa garde à ses cotés. « On décolle » dit Nanti à travers un haut parleur du vaisseau.

Echo se tourna vers moi. « On décolle d'abord, le temps que je trouve comment annoncer ça à Nanti. La poisse.

- Mérino !

- Ouhai ».

Je me retournais pour voir Thymothe. Il était décomposé.

« Quoi ?

- Maelie.

- Alors tu as entendu !

- Il lui est arrivé quelque chose

- Je crois oui.

- Elle est…

Je ne le laissai pas finir. « Non elle n'est pas morte.

- Calme-toi » me dit Echo.

Nanti apparut à ce moment là claquant violemment la fermeture de ses quartiers. « Tu as récupéré la communication ? » demanda-t-il.

Elle était dans le palais quand on a perdu le contact. Je ne pus me résoudre à en dire plus. Il me fallait un peu de temps

« Ben elle est plus dans le palais » dit Tymothe.

- Qu'est ce que tu en sais ?

- Elle est dans ma chambre.

- Quoi ? » Cette fois, Nanti se joignit à mon interrogation.

« C’est ce que j’essayais de dire, je suis rentré dans mes quartiers et je l’ai trouvée étendu sur le sol.

- Comment ?

- Vivante ? » Bon d’accord, par ordre de priorité la question de Nanti était plus urgente mais mon comment valait aussi qu’on s’y attarde.

« Je ne sais pas » dit Thymothe. « A vrai dire, je ne me suis pas attardé.

- Tu aurais dû » cracha Nanti en le repoussant pour se faire la place vers la chambre de Thymothe.

Maelie était là en effet. Etendue à même le sol dans une position que personnellement je ne choisirais pas pour dormir et quasiment nue vue que les lambeaux de tissus qui traînaient autour d’elle ne lui couvraient rien mais ce qui attira encore plus mon attention c’est un filet de sang au coin des lèvres. Pas bon ça, pas bon du tout.

Nanti n’avait pas hésité. Il s’était agenouillé et lui tâtait le pouls. « Elle est encore vivante » souffla-t-il. « Mérino, va me chercher un stimulant.

- Ces trucs qui te donnent la patate pendant une semaine ?

- Oui. »

Je m’exécutais. J’avais utilisé une fois ce type de drogue. Ca m’avait suffi pour comprendre une chose : Dormir, il n’y a rien de mieux.

Nanti lui fit l’injection. Pendant une minute il ne se passa rien. Elle restait là, inerte. C’était horrible à voir.

Puis elle se souleva d’un coup et inspira une grand goulée d’air avant de se mettre à tousser complètement affolée. Il y avait de quoi. Elle sembla hésiter, essaya de bouger, de se relever malgré les injonctions de Nanti lui ordonnant de rester immobile puis se courba en deux et vomit un mélange de nourriture, de bile et de sang.

« Ca va aller » dit Nanti tandis qu’elle se mettait à trembler. Il la souleva dans ses bras et m’ordonna de préparer le scanner. Thymothe resta là complètement abruti fixant la mare de vomi teinté de rouge répandue sur le sol de ses quartiers. Il n’allait tout de même pas faire son difficile. Je préparai le scanner et demandai au vaisseau de nous répertorier la liste des lésions éventuelles de Maelie.

« Alors ? » demanda Nanti tandis que le vaisseau affichait les résultats sur l’écran principal. La liste était la plus longue que j’avais pu voir. Même le jour où Echo s’était fracassé au bas du Roc de Gari, il n’avait pas eu autant de dommages.

« Maelie, arrête de bouger » dit Nanti tentant de la plaquer sur la table. Vu la dose de drogue ingurgitée, il aurait du mal à en faire quoi que ce soit. Elle pourrait être morte qu’elle bougerait encore.

Je me forçais à regarder l’interminable liste. « Vaisseau, affiche-moi uniquement les lésions sérieuses.

- Définir terme de sérieuses. »

Putain, cette machine était vraiment bonne à rien.

« Celle qui peuvent la tuer. »

Je fermais les yeux retardant le moment où je verrais la liste et me forçai à les ouvrir quand Nanti m’engueula. Il tentait toujours de garder Maelie immobile et se plaignait de mon inutilité. Je me décidais à regarder l’écran. Il était vide. Je soupirais de soulagement. Malgré les nombreux dommages sa vie n’était pas en danger. Du moins pas sur une blessure en particulier mais le nombre de lésions étaient tel que ça pouvait être un problème. Je m’évertuais à avoir un diagnostic plus précis et d’étudier les blessures répertoriées par le scanne comme étant les plus sérieuses. Pour la première fois depuis son départ, Charlie me manqua.

« Faut qu’elle voie un médecin.

- Tu as entendu Echo ?» demanda Nanti. Ce dernier répondit à travers les hauts parleurs du vaisseau. « Station V5764 dans treize heures ».

Vu la vitesse à laquelle il nous avait donné l’info, Echo avait anticipé.

Rien de plus proche ?

« La planète artificielle » dit Echo.

Evidemment vu qu'on venait de la quitter

Nanti hésita « Mérino, tiendra-t-elle 13 heures ?

- Théoriquement oui. Elle semble n’avoir rien de vraiment sérieux mais la profusion de lésions m’inquiète d’autant plus que peu sont visibles. La majorité sont des blessures internes et j’ignore comment les traiter et si elles peuvent mal tourner. » Je n’ajoutais pas que dans tous les cas, il vaudrait mieux qu’elle se tienne tranquille. C’était évident.

« Vaisseau peut-on lui administrer un calmant ? » Je préférais demander. En général mélanger excitant et calmant est peu recommandé.

La réponse fut positive et Nanti approuva mon idée en lui donnant de quoi abrutir un bon mercenaire de rue.

Elle se calma peu à peu, ferma les yeux et s’endormit.

Je la recouvrais d’une couverture isolante et me laissais glisser contre le mur en soupirant. J’étais trop vieux pour ce type d’émotion.

« Vous croyez que c’est qui qui lui a fait ça ? » demandai-je à Nanti.

« Je ne sais pas. Qui que se soit, je me demande pourquoi ne pas la tuer

- Statistiquement, si on l’a téléportée, elle n’avait qu’une chance sur 2354 de survivre. C’est le potentiellement innocente qui me l’a dit quand j’ai fait remarquer que c’était pratique comme mode de déplacement.

- Pas avec un implant psychique de son niveau. Vu sa résistance, je dirais qu’elle avait une chance sur deux de s’en tirer. Tu confirmes vaisseau ?

- Manque données. »

Et les approximations, il ne savait pas faire.

« Bref, elle avait tout de même de bonnes chances d’y rester.

- Justement, si on voulait la tuer, il y avait des moyens plus sur et si on voulait la garder en vie aussi.

- Qu’a-t-elle dit avant... Avant d’arriver ici ?

- Heu que la princesse avait disparu, ou plutôt était partie sans prévenir en prenant une navette.

- Je n’exclue cependant toujours pas sa responsabilité pour autant. Maelie n’a pas vu son agresseur ?

- Non mais elle a parlé. Elle a dit un truc du genre « c’est ce que tu crois ? »

- Elle ?

- Oui, c’était une voix de fille

- Et tu serais capable de reconnaître sa voix ?

- Non, déjà l’implant déforme les voix mais en plus la transmission était très mauvaise.

- Vaisseau garde une copie de l’enregistrement d’aujourd’hui de la communication entre Mérino et Maelie. »

Je repris ma réflexion. Pourquoi renvoyer Maelie ici ?

« La renvoyer, morte ou vive, n’était pas mal pour nous narguer » pensais-je.

Je me portai volontaire pour passer la nuit au chevet de Maelie. Elle se réveilla une fois, ou peut-être qu’elle faisait juste des cauchemars car elle se mit à s’agiter en émettant des cris ressemblant à des supplications. Je lui pris la main et tentais de la rassurer lui disant que tout allait bien et qu’elle ne risquait plus rien. Elle ouvrit les yeux et demanda ou elle était.

Je lui dis qu’elle était sur le potentiellement innocente et elle parut se détendre. Elle se mit à pleurer. Je lui demandais qui lui avait fait du mal.

Elle se rendormit sans m’en dire d’avantage

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