mardi 27 novembre 2007

Chapitre 17

17

13/08/3023 Datation légale de Valence.

21H15/ 24 : horaire du vaisseau potentiellement innocente

20H00/25 : horaire local = horaire de Valence

Journal de bord du potentiellement innocente.

Escale sur la plate-forme B324 périphérie de la planète catégorie A : Belle d’été.

La plate forme B324 est une des plus ancienne en place dans le système. J’avais souvent entendu parler de cette curiosité sans jamais avoir eu l’occasion d’y mettre les pieds. Elle a été conçue il y a environ 600 ans. En 2340 pour être précis. La belle d’été ne connaissait pas de problème de surpopulation à l’époque. Une fois saturée par une croissance rapide de la population et l’allongement de l’espérance de vie par les traitements de régénération cellulaire, elle avait tout naturellement colonisée l’Immortelle et le joyau vert et suivait un régime social sur fond de cotisation où les plus riches voyaient une partie de leur salaire disparaître pour contribuer à l’aide des plus défavorisés dans une sorte d’utopie d’égalité et de bonheur pour tous. Certains éminents savants richissismes refusant ce système dans lequel se prélassait les plus pauvres, suivant leur dire, décidèrent de s’expatrier hors planète. Ils conçurent donc une base spatiale gigantesque suivant les critères de l’époque en périphérie de la Belle d’été et démarrèrent une nouvelle civilisation.

Les résultats furent catastrophiques en grande partie à cause du manque de personnel de faibles qualifications mais la station spatiale était une telle merveille technologique que, 600 ans après, bien peu de modifications ont été effectuées. La station garde un charme désuet. Après, on aime ou on n’aime pas. Je dois dire que c’est dépaysant. Le plus impressionnant est la verrière. Entièrement conçue dans une sorte de plexiglas entrecoupée d’arcades métallique. A l’époque, on ne maîtrisait pas encore les champs de force permettant de garder l’air autour des stations. Je pense cependant qu’actuellement des champs de force ont été ajoutés et que la verrière est maintenue uniquement par soucis de préservation du patrimoine et du tourisme qui va avec. L’économie de la station est florissante grâce aux nombreux curieux qui se plaisent à venir la visiter mais pas uniquement. Des serres hydroponiques de grandes dimensions ont été ajoutées et par la proximité de la belle d’été, il a été possible de concevoir certaines serres dites naturelles avec de la terre d’importation. Je n’ai pas eu l’occasion de les visiter. Ces secteurs sont évidemment très sécurisés. On trouve aussi des entreprises de rénovation de vaisseau de bons niveaux quoique à mon avis un peu cher. De toute façon, plus on approche des planètes de type A plus la vie est chère, excepté peut être au niveau des matières premières planétaires, mais ces dernières sont de toute façon hors de portée de ma modeste bourse qu’on y retire un crédit ou non.

- Mérino ?

- Attends, Maelie, je finis mon compte rendu est je suis à toi. Va commander quelque chose à manger en attendant, je garde la place.

Oui, bon. Donc je disais que le potentiellement innocente avait fait escale sur la station B324 par une lubie de notre patron qui souhaitait le mettre aux normes planétaire. Je n’en vois pas l’utilité à partir du moment où, de toute façon, nous avions une autorisation planétaire. Enfin, si elle est valide. Pour l’instant, je suis déjà heureux que cette puce d’accréditation ne nous ait pas encore explosée dessus. Chaque jour, je fais un check up complet du potentiellement innocente afin de certifier qu’elle n’avait pas déclenché un virus, une liaison de donnée suspecte ou un tracé de circuit mais tout semble normal. Si on peut évoquer le terme de normal malgré les circonstances dans lesquels nous avons obtenu cette accréditation. Le patron craignait, justement à cause de cela, qu’on ait des contrôles draconiens pour entrer sur la Belle d’été et ne voulait rien laisser au hasard. Il est entré en communication avec un client potentiel sur la planète. Un Propriétaire terrien qui était prêt à nous vendre un chargement de terre et Maître Nanti a déjà un acheteur dans le secteur X. Rare sont ceux osant ce type de chargement, c’est encombrant, peu discret et sa valeur attire toutes les flottes de pilleurs telle un phare. Nanti a choisi son client à la périphérie du système, personne n’est assez fou pour garder un chargement de terre sur une telle distance. Quand je lui en ai fait la remarque, il m’a répliqué que, justement, c’est pour cette raison que son client était prêt à payer une fortune pour cette livraison.

A condition qu’elle arrive à bon port ai-je pensé. Le patron, n’est pas un idiot et s’il prend des risques, c’est toujours calculé. Je sais que avant d’accepter ce chargement, il s’est longuement entretenu avec Maelie afin de calculer jusqu’où pourraient nous servir ses potentialités.

Maelie ne m’a pas parlé en détail de ses discussions. Je ne suis pas un spécialiste de l’irrationnel. Elle s’est contentée de me dire qu’elle allait devoir trimer comme une bête et que c’était de l’exploitation pire que ce qu’elle subissait chez les sylphides puis a ajouté en souriant, mais ça devrait passer. Non, ça va passer a-t-elle précisé car si je réussis, maître Nanti a dit que j’aurai une prime.

Moi, quand je lui ai demandé une prime, il m’a dit qu’il ignorait la teneur exacte de ce terme de vocabulaire. Il a dû se renseigner depuis.

Bref, la mise aux normes planétaire du potentiellement innocente s’est avérée d’un coût exorbitant. Je pense en grande partie qu’il s’agit d’exploitation. Les spécialistes du domaine savent que ceux ayant une accréditation planétaire sont plein aux as et donc facile à plumer. Ce n’est pas notre cas. Il a été décidé de faire notre possible avec les moyens du bord, c'est-à-dire, Thymothe et moi. Nous avons bossé comme des malades pour bricoler quelque chose afin de réduire aux maximums les rejets externes et cela sans la moindre prime. Ensuite, la patron s’est procuré un vieux moteur auxiliaire électromagnétique. Totalement inutile sauf en atmosphère ou ça a l’avantage d’être non polluant. Il ne marche pas mais c’est juste pour faire illusion ainsi, en cas de contrôle, on peut montrer qu’on avait tout ce qu’il faut mais que malheureusement, il vient de nous lâcher. Je craignais pour l'identité de Martel mais son implant A remplace avantageusement tout test ADN et est un passeport diplomatique suffisant pour ne pas avoir besoin d'une preuve de son identité. Tant que je parle de Martel, je crois bon d'ajouter qu'il est de plus en plus bizarre. Il reste souvent ses temps libres enfermés dans ses quartiers, élude mes questions et soit il parle tout seul soit il a trouvé un moyen de faire passer des communications sans qu'on le sache. Déjà, il a cessé ses crises de mauvaises humeurs et ses élucubrations aux cours desquels il imagine nous inciter à faire une guerre contre Valence et les indépendantistes à nous tout seul. Je dois être trop vieux pour cmprendre les gamins.

Prêt à conquérir la belle d’été, le patron nous a rassemblé pour un petit discours motivant sur les futurs richesses que nous allions amonceler expliquant que les denrées planétaires n’étaient quasiment jamais exportée jusqu’en périphérie, que les continentaux voyaient les périphériques comme des va nu pieds sans le sous mais qu’ils avaient torts, qu’ils y avait aussi des richesses en périphérie et des acheteurs potentiels.

On savait tous ça, notre crainte concernait plutôt les indépendantistes. Le patron a éludé le sujet disant juste qu’il maîtrisait la situation. On a tous regardé Maelie car on sait que question maîtrise c’est plutôt elle la pro et à la voir toute frêle et délicate, j’ai pas été rassuré.

Ensuite, Nanti a dit qu’il était désolé mais que Maelie devrait rester sur B324 en attendant le chargement. Il ne voulait pas prendre le risque de faire atterrir la petite sorcière sans autorisation. Déjà, il faudrait que Martel en obtienne une pour le reste de l’équipage, il se renseignerait sur place, si tout marchait pour tenter de faciliter les formalités d’entrée pour une dissimulatrice.

Il n’avait pas voulu la brusquer mais j’avais surpris une conversation qu’il avait eu sur le réseau avec le maître Malha de la flotte les rois du monde. Le vieux pirate avait entendu parler d’un polymorphe qui avait voulu obtenir cette autorisation on lui avait répliqué qu’aucun sorcier n’entrait sur la belle d’été excepté ceux des clans reconnus et bien sur ceux sous les ordres directs de Valence et des familles planétaires.

- C’est vrai ça ?

- Ho Maelie, je ne t’avais pas entendu revenir. »

quelques barres protéinées furent jetées sur la table. « Je me doute oui, sinon tu aurais omis ses quelques détails dans ton rapport.

- Je suis désolée.

- Pas besoin de ta pitié, de toute façon je le savais. Je me demandais juste quand quelqu’un aurait le courage de me le dire en face. »

Pauvre petit bout. Je tentai de dédramatiser : « De toute façon, les planètes, c’est pas terrible. La pesanteur est trop forte et il peut faire froid et…

- C’est pour cela que tu as crié à l’injustice quand Nanti a dit que se serait toi qui resterait avec moi ? »

Oui, là, elle marquait un point. Je l’avais trouvé vraiment injuste. En plus, j’ai bossé comme un malade pour mettre le vaisseau aux normes. Je pensais que Thymothe resterait, il a la hantise des planètes et de tout ce qui risquerait de contenir un microbe. Mais non, il était indispensable qu’au moins un des mécano accompagne le potentiellement innocente et le patron a désigné Thymothe. Ce dernier a dit qu’il ne voulait pas y aller mais le patron a dit qu’il n’avait pas le choix. Charlie devait venir pour voir un fournisseur potentiel en certaines herbes curatives, Echo devait piloter bien évidemment, Martel nous servait de droit d’entrée et moi, je devais m’occuper de Maelie car il était hors de question de la laisser seul. D’abord, ce n’était pas convenable et ensuite, c’était dangereux. Je ne sais pas si c’était plus dangereux pour elle ou pour les autres mais c’est sur que ; quelque soit ses pouvoirs, on ne laisse pas une petite jeune fille jolie comme un cœur seule sur une base spatiale.

Il a dit qu’il ne voulait aucune discussion mais m’a tout de même pris à part pour expliquer qu’il ne pouvait pas confier Maelie à Thymothe. Je comprends son point de vue. Thymothe est un bon gars mais il est rustre, ne s’intéresse qu’aux filles de petites moralités et n’est pas apte à chaperonner une jeune fille bien. Il serait capable de la vendre dans un bordel.

« Tu sais Maelie, on pourrait en profiter pour se faire des vacances, après tu auras beaucoup de boulot. Nous sommes sur une station très chics, il doit y avoir des centres commerciaux. On pourrait te trouver des jolies toilettes et puis on irait dans une salle de jeu ou ce que tu veux.

- Je voulais aller sur une planète ».

Je tapotais l’épaule de Maelie.

« Qu’est-ce qu’il y a de plus sur une planète ?

- C’est joli, c’est comme le vaisseau village où tout est propre et beau.

- Le vaisseau Village est un nid de mecs de Valence.

- Et alors ? » se récrie-t-elle « vous êtes tous à maudire Valence mais je ne les trouve pas si mal, leurs vaisseaux sont jolis et les gens qui y vivent ont pleins d’activités sympas.

- Ils peuvent, ils régentent tout le système.

- Et alors, quel mal ? Que je sache, les taxes ne sont pas pires et c’est plus pratique d’avoir des crédits qui passent partout et une langue commune et ils respectent les sorciers ? »

Ha la naïveté enfantine couplée à la hargne adolescente. « Assieds toi Maelie, tu mélanges tout, je ne dis pas que la dictature de Valence ne nous ait apportée que des mauvaises choses, ce que je leur reproche c’est de ne pas nous avoir donné le choix. Tu vois, ceux qui ont conçu cette station vivaient dans un système qui ne leur plaisait pas. Pourtant, c’était une démocratie, mais ils étaient minoritaires et ne voulait pas ce plier aux lois en vigueur. A tort ou à raison, ce n’est pas important. L’important, c’est qu’ils avaient la possibilité de dire non et de partir. Ils ont crée cette station et y ont vécu selon leur désir.

- Et ce fut une catastrophe.

- Oui, là ce n’est pas un bon exemple mais l’important c’est de laisser un choix. Valence ne laisse aucun choix, ils se sont appropriés tout le système contre notre volonté et obligent la population entière à suivre leurs règles et tuent les opposants. Impossible même de fuir avec eux, ou qu’on aille, on est considéré sous leur loi. C’est peut-être bien d’avoir une langue commune mais pourquoi avoir imposé la leur ?

- Parce que la tienne serait mieux sans doute ?

- Ce qui aurait été bien ça aurait été de voter afin de choisir en commun. » Bon, ce type de vote avait déjà été exécuté sans autres succès que des manifestations en tout sens mais ce n’était pas la peine de tergiverser avec ça.

« Mais nous, quand on est obligé d’obéir à Nanti c’est pareil et on n’a pas grand-chose en échange. »

Elle commençait à m’énerver cette petite. « L’important c’est le choix, je t’ai dit. Je peux toujours refuser l’autorité de Nanti et trouver un boulot ailleurs. Valence ne s’occupe que de quelques privilégiés, ils négligent la périphérie et ferment les yeux sur la piraterie des indépendantistes tant qu’ils n’assassinent pas une flotte entière. Pourtant, ils demandent des sommes exorbitantes pour la protection et se gardent les meilleurs sorciers ».

Je n’aurais peut-être pas du dire ça, c’est vrai qu’elle avait toujours vécu dépourvu de choix d’abord en tant qu’esclave des Sylphides et maintenant, elle savait que si elle partait, elle risquait de se faire ramener aux Sylphides voir, je n’excluais pas la possibilité que le patron la dénonce si il la trahissait. Sans doute était-elle payée, elle gardait tout de même son statut d’esclave.

Et n’oublie pas le principal, si tu ne peux pas entrer sur la belle d’été, c’est à cause de Valence, c’est eux qui ont jeté tout le monde hors planète.

« Il parait que si toute la population était restée, les planètes auraient étouffées, qu’on polluait trop et qu’on aurait plus eu de matière première et qu’on serait tous mort.

- Bien sur, et les quelques millions des privilégiés polluent moins que nous sans doute ? Ils se sont déclarés régents des planètes, ont jeté dehors neuf dixième de la population ne laissant que ceux capables de leur payer des taxes exorbitantes et les obligeant à suivre des normes draconiennes. Tu trouves ça normal toi ? »

Elle ne répondit pas. J’espérais avoir réussi à la convaincre. Je demanderais à Echo de lui dire un mot. Après tout, il a passé toute son enfance sur la belle d’été avant que ses parents se fassent tuer à la guerre et lui jeté dehors avec ses frères en même temps qu’un million d’autre sur une base sordide pouvant contenir au plus 100 000 personnes. Paraît même qu'il a vu ses frères mourir l'un après l'autre à cause des épidémies qui s'étaient déclarées dans ses taudis insalubres. Il devrait trouver les mots pour la convaincre. Quoique, si elle osait évoquer devant lui la possibilité que la dictature de Valence ne soit pas un mal, il risquerait de la frapper puis de hurler sur cette jeune génération qui n’y connaît rien et n’a pas vécu la guerre.

« Tu comprends ? »

Elle hocha la tête sans que je cerne si ça voulait dire oui ou non.

Je me demandai soudain ce que Valence ferait si elle allait leur demander du travail. La corpo de Valence n’aime pas les Sylphides, ils les supportent par obligation ne sachant comment s’en débarrasser et évitaient de s’occuper de leurs affaires et réciproquement. Jamais ils n’auraient pris le risque de leur enlever un de leur esclave mais vu qu’elle était déjà partie, ils seraient peut-être contents de se l’approprier. Ils n’avaient nul besoin de sorciers supplémentaires mais se plaisait à leur proposer de bons boulots juste pour éviter que les autres les aient. Je pensais même que ce ne serait pas mal pour la petite, qu’elle aurait une vie plus décente dans un meilleur environnement et qu’elle pourrait peut-être même faire des missions planétaires. Ou alors il la renverrait chez les Sylphides afin d’entretenir leur bonnes relations avec eux sachant qu’une sorcière de plus chez eux ne ferait pas une grande différence.

« A quoi tu penses » me demanda-t-elle.

« A rien.

- Tu crois vraiment que les barrières planétaires détectent les sorciers ?

- Sans aucun doute.

- Tous ?

Sauf les Sylphides qui s’infiltrent partout mais ils n’ont pas la possibilité matérielle de causer beaucoup d’ennui et leur flotte humaine n’y a pas accès.

- Et ceux de Calice ?

- Et ceux de Calice n’auraient sans doute aucun mal à passer les barrages en se téléportant, ces vermines valent les sylphides mais ils ont quasiment tous péri dans la destruction de Calice et déjà avant ça, les seuls qui vivaient hors planète étaient esclaves de Valence.

- Esclaves ?!! »

Je m’étonnais d’une telle réaction. La petite s’était accoudée sur la table rejetant le reste de sa barre de protéine. Elle manquait d’éducation. Elle avait soif d’apprendre mais personne n’avait de temps à perdre pour lui parler histoire ou politique. Entre nous on préférait passer nos temps libre à parler de jolies fesses et de jeux, je dois m’en repentir, après, il n’était pas étonnant qu’elle se fasse des idées erronées par manque d’information.

Je mastiquai intensément ma barre sans goût le temps de trouver comment aborder un sujet pourtant connu mais pas évident à transmettre à une petite fille.

« Oui, tu sais, Calice avait perdu leur flotte spatiale et Valence avait trop peur d’eux pour leur laisser ne fut-ce qu’un vaisseau. Ils les ont cantonné à leur planète morte de merde et accepté de les ravitailler uniquement en échange de sorciers esclaves qui se devaient de leur obéir s’ils ne voulaient pas que cesse les ravitaillements. Ca a duré ainsi pendant plusieurs centaines d’années. Tous ceux qui quittaient la planète étaient esclaves et les autres ont péri à la destruction de la planète.

- Mais je croyais que le clan de Valence était allié à Calice. J’ai entendu dire que ceux de Valence ont plus de sang de Calice que de Valence.

- Evidemment car ça ne leur a pas suffit d’avoir de puissants sorciers à leur bottes, ils voulaient eux-mêmes acquérir la puissance de Calice, alors, ils se sont tapés aussi quelques jolies esclaves de Calice qui ont mis bas de jolis petits bébés potelés qui ont été de suite enlevé à leur mère et malgré leur illégitimité reconnus par leur père et adoptés par les femmes de Valence ou alliées à Valence. Programme de sélection génétique ils ont appelé ça. Voila comment agit le clan de Valence. Alors tu m’excuses de ne pas m’extasier juste parce qu’ils ont de jolis vaisseaux.

- Et celle qu’on a vu sur le Village, Mélanie, c’est aussi une esclave ?

- Oui. Une poule de luxe chargée de faire de jolis bébés bien puissants à Valence même si maintenant ils pourraient les faire in vitro mais ca m’étonnerait, si j’avais une femme comme Mélanie à mes ordres, j’aurais bien envie de les faire naturellement mes gamins.

- La sorcellerie ne marche pas in vitro. »

Voila qu’elle m’apprend quelque chose.

« Pourquoi ?

- Je ne sais pas, c’est ce qu’on dit, il faudrait demander au doc. »

Je hochai la tête, sans doute encore du baratin pour se taper des sorcières.

- Mais si ils tenaient les sorciers de Calice juste par chantage, si la planète Calice a disparu, pourquoi Mélanie ne fuit pas ?

- Tu sais, les deux ordonnances de Valence, Matis et Malhari doivent être presque aussi puissants qu’elle et surtout, ce sont les opposants de Valence, autant dire nous, qui avons détruit Calice et je cois que ce jour là, elle a préféré prendre le parti de Valence contre nous comme la plupart des survivants de Calice. C’est compréhensible. Sans parler de l’horreur de la chose, niveau stratégique, C’était stupide de détruire Calice. L’idée était de débarrasser Valence de sa réserve de sorcier mais du coup ceux qui restaient ont choisi le mauvais camp. On ne peut pas leur en vouloir. »

Maelie gobait mes paroles, je ne l’avais jamais vu si concentrée sauf quand elle pratiquait la sorcellerie. Je me demandais ce qui pouvait bien se passer dans sa petite tête.

« Pourquoi ça compte tant pour toi d’aller sur une planète ? Tu as encore des tas de chose à découvrir dans l’espace. »

Elle se renfrogna puis finit par se lancer. « Un jour, Quand j’étais petite, je devais avoir six ou sept ans, les Sylphides avaient invité des seigneurs planétaires. Ils faisaient parfois organiser des réceptions somptueuses pour des invités humains. J’aimais ca, je me chargeais de la préparation et on avait de la nourriture naturelle et on pouvait manger les restes et grappiller discrètement en préparant. Bref, il y avait un petit garçon de mon age parmi eux et il n’avait pas été invité dans la salle de négociation alors il est venu me voir et il m’a chanté une chanson.

Je m’en souviens encore : Ca faisait : un ours grimpe sur une montagne pour voir ce qu’il y a derrière. Et que penses-tu qu’il voit ?

Il voit une autre montagne et que penses-tu qu’il fait

Il grimpe sur l’autre montagne.

Et que penses-tu qu’il voit ?

Et ça reprenait comme ça. »

Modérément passionnant. « Jolie comptine et alors ?

- Je lui ai dit que je ne savais pas ce qu’était un ours ni une montagne et je lui ai demandé de m’expliquer.

- Il m’a dit qu’il ne voyait pas l’intérêt de m’en parler vu que je n’en verrais jamais car je n’étais qu’une simple esclave des Sylphides et que jamais je n’aurais l’autorisation d’aller sur une autre planète que Kelly, que mon univers se résumerait à tous jamais à ces marécages brumeux et puants.

- Les enfants peuvent être cruels.

- Les parent aussi, car son père est sorti après ça et a récupéré son fils en disant qu’il avait mieux à faire qu’à traîner avec les esclaves.

- Sympa en effet.

- Ensuite, Je ne l’ai plus jamais vu, mais, je me suis promis que j’irais sur une planète un jour. Une vraie, pas une comme Kelly. J’ai demandé à mon maître l’autorisation d’apprendre la sorcellerie. Comme ma mère était médium, je pouvais avoir certains dons. Mon maître a accepté de me faire tester, il m’a découvert des potentiels de dissimulatrice et a estimé que ça pourrait lui être utile d’investir dans un implant. J’ai travaillé très dur et je tenais par mes rêves, je me voyais retrouver ce garçon qui m’avait insulté et lui montrer de quoi j’étais capable mais je savais qu’en restant chez les Sylphides, jamais je ne pourrais aller sur une planète car personne n’a confiance dans les sylphides ni dans leur serviteurs. J’ai décidé de fuir, ma mère m’avait dit que je devais demander de l’aide à un certain Marvin Shaman de la station ??? J’ai confié un message à un homme de passage. S’il me dénonçait, j’étais morte mais j’étais prête à tout. A peine un mois plus tard, le potentiellement innocente s’est posé et j’ai aperçu le signe convenu sous le nom du vaisseau, alors, je suis monté. »

Voila que je comprenais mieux ? Je m’étais demandé aussi pourquoi Maître Nanti nous avait demandé d’ajouter ce signe pour l’enlever ensuite.

Maelie soupira. « Maintenant, il ne me reste plus qu’à poser le pied sur une planète de type A et j’aurais prouvé que ce prétentieux se trompait.

- Tu veux dire que tu veux aller sur une planète juste à cause de ce qu’un sale gamin t’a dit il y a des années ?

- Il a blessé mon amour propre.

- Le patron me fait ravaler tout sentiment de fierté chaque jour, je n’en fais pas une maladie.

- Nanti, c’est sa façon d’être, il n’est pas vraiment méchant et au fond il nous aime bien.

- Et même si tu allais sur une planète, celui qui t’a insulté ne le saurait jamais.

- Oui, mais moi, je le saurais, je saurais qu’il s’est trompé et qu’en vrai, je suis quelqu’un.

- Mais tu es quelqu’un. Tu es même quelqu’un de bien.

- Tu es gentil Mérino mais ce n’est pas suffisant pour moi. C’est quelque chose que je dois faire et que je ferais un jour, voila tout. »

Elle prit son verre et but son contenu cul sec avant de faire une grimace et de jeter le gobelet dans le trou au centre de la table.

« Oui, je dois le faire » murmura-t-elle encore.

C’est bizarre, c’était de l’entêtement stupide, digne d’une gamine et en même temps, elle ne m’avait jamais paru plus femme. Quelque chose dans son attitude m’empêchait de me moquer d’elle. Son petit défi était sérieux à ses yeux.

« Bon alors, que veux-tu faire ce soir ? On pourrait aller danser tous les deux ?

- Non » dit-elle en s’étirant. « Je voudrais qu’on trouve un endroit calme où dormir. Le potentiellement innocente doit arriver demain et si le chargement s’est effectué correctement, je n’aurais pas beaucoup l’occasion de dormir avant la livraison ». Houla, si elle commençait à devenir raisonnable, il y avait de quoi s’inquiéter sérieusement.

« Maelie ?

- Oui.

- Je suis désolée que tu ne puisses pas réaliser ton rêve.

- Mais je le réaliserais ».

Je hochais la tête et lui souris. Je ne voyais pas de raison de la contredire. Ca fait du bien de nourrir quelques illusions.

Elle se leva et déconnecta le champ de force sur lequel elle était assise et se frotta les yeux. C’était pas plus mal. J’allais mettre la petite au lit et me faire une petite virer pour me consoler de ne pas avoir pu aller sur la belle d’été

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